Allaitement et allergies alimentaires : des réponses à vos questions

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On connaît depuis longtemps les bienfaits de l’allaitement. Mais joue-t-il un rôle dans le développement des allergies alimentaires ?

Le développement de l’allergie alimentaire chez le bébé allaité est source de nombreuses questions pour les nouveaux parents. Voici ce que nous savons à ce jour sur le sujet.

Les allergènes peuvent-ils se retrouver dans le lait maternel ?

Oui. Plusieurs études ont démontré que les protéines allergènes peuvent effectivement être excrétées dans le lait maternel. C’est le cas, notamment, de la β-lactoglobuline du lait, de la gliadine du blé, de l’ovalbumine de l’œuf, et de l’ara h 2 de l’arachide [1].

La quantité d’allergènes qui se retrouve dans le lait maternel et à laquelle le bébé est exposé serait toutefois très variable d’une femme à l’autre, mais aussi dans le temps pour une même femme [1, 2, 3]. On croit que certains facteurs pourraient influencer le passage des protéines dans le lait maternel. La quantité de l’aliment consommé avant l’allaitement et le fait que cet aliment soit ingéré ou non sur une base régulière en seraient des exemples. 

Pour en savoir plus :

Le bébé allaité peut-il faire une réaction allergique au lait maternel ?

Non, le bébé ne peut être allergique au lait maternel. Cependant, il pourrait réagir à des protéines consommées par la mère qui seraient par la suite excrétées lors de l’allaitement.

Les protéines qui passent dans le lait maternel peuvent-elles provoquer une réaction allergique ?

Récemment, une revue systématique de la littérature a évalué la question [4]. Après avoir analysé 32 études sur le sujet, les auteurs ont conclu que la quantité de protéines allergènes pouvant être excrétée dans le lait maternel serait de beaucoup inférieure à celle qui serait nécessaire pour produire une réaction chez la majorité des personnes allergiques.

Cela dit, il demeure possible qu’un bébé allaité ait une réaction allergique au contact d’une protéine présente dans le lait maternel, même si le risque est faible. Il faut aussi garder en tête qu’il existe différents types d’allergies alimentaires et qu’une réaction n’implique pas toujours l’anaphylaxie.

Pour en savoir plus :

L’allaitement protège-t-il le bébé contre le développement des allergies alimentaires et d’autres maladies allergiques ?

C’est incertain.

Des études avancent l’existence d’un lien entre la présence d’allergènes dans le lait maternel et l’apparition d’une allergie alimentaire chez le bébé allaité [1]. D’autres vont toutefois dans le sens contraire et concluent à un effet protecteur de l’allaitement sur le développement des maladies allergiques [1].

Voici ce que l’on sait à l’heure actuelle :

  • L’Organisation mondiale de la santé recommande l’allaitement exclusif jusqu’à l’âge d’environ six mois, soit jusqu’à l’introduction des aliments solides, en raison de ses nombreux bienfaits sur la santé du nouveau-né. L’allaitement est ensuite conseillé jusqu’à l’âge de deux ans et plus en complémentarité de la nourriture.
  • Selon la Société canadienne de pédiatrie, il n’y aurait aucun avantage à éviter les aliments allergènes pendant la grossesse et l’allaitement [5]. Le taux d’atopie chez le bébé ne changerait pas, peu importe la diète de la mère.
  • La consommation d’arachide par la mère qui allaite pourrait diminuer le risque de sensibilisation chez l’enfant, à condition que l’aliment soit introduit dans la diète du nourrisson avant l’âge d’un an [6]. C’est ce que l’on appelle le concept de triple exposition (consommation de l’arachide par la mère, allaitement et introduction de l’arachide avant l’âge d’un an).   
  • L’allaitement encourage l’instauration d’une flore intestinale en santé, ce qui pourrait réduire le risque d’atopie chez le bébé [7]. Cette association reste toutefois à valider. Pour le moment, les scientifiques ont de la difficulté à expliquer le lien entre le manque de diversité du microbiote et le développement d’une maladie allergique.

Pour en savoir plus :

Quelles sont les recommandations officielles concernant l’allaitement et la prévention des allergies alimentaires ?

La Société canadienne de pédiatrie recommande l’allaitement exclusif dans les premiers mois de vie du nourrisson, soit jusqu’à l’introduction des aliments solides. Par la suite, l’allaitement devrait être poursuivi jusqu’à l’âge de deux ans et plus, autant pour ses bienfaits sur la santé immunitaire que sur le développement du bébé.

Pour en savoir plus :

Que faire si l’on soupçonne une allergie alimentaire chez son bébé ?

La première chose est d’identifier les signes d’une allergie chez le bébé. Les manifestations suivantes de l’allergie figurent parmi les plus courantes chez le nourrisson :

  • pleurs excessifs ;
  • vomissements en jet ;
  • mucus ou sang dans les selles ;
  • difficultés répétées à boire ;
  • inconfort constant.

Un bébé allaité qui présente ces manifestations est peut-être allergique à une des protéines qui se trouve dans le lait maternel. Si tel est le cas, la mère devra cesser de consommer l’aliment soupçonné pendant 7 jours et observer les changements d’état ou de comportement chez le bébé. En l’absence d’amélioration, il se peut que les symptômes soient causés par un autre aliment ou encore par un problème de santé. Dans tous les cas, il est important de consulter un professionnel de la santé afin d’obtenir un diagnostic pour le bébé et un accompagnement pour la mère dans sa diète d’éviction.

Pour en savoir plus :

Quelques ressources intéressantes :

Par Katia Vermette

[1] Schocker, F. et Jappe, U. (2022). Breastfeeding: Maternally transferred allergens in breast milk: Protective or sensitizing? Mol Ntr Food Res, 66(15):e2200066. DOI 10.1002/mnfr.202200066

 

[2] Fukushima, Y., Kawata, Y., Onda, T. et Kitagawa, M. (1997). Consumption of cow milk and egg by lactating women and the presence of β-lactoglobulin and ovalbumin in breast milk. The American Journal of Clinical Nutrition, 65:30-5. DOI 10.1093/ajcn/65.1.30

 

[3] Sorva, R., Mäkinen-Kiljunen, S. et Juntunen-Cackman, K. (1994). Beta-lactoglobulin secretion in juman milk varies widely after cow’s milk ingestion in mothers of infants with cow’s milk allergy. The Journal of Allergy and Clinical Immunology, 93(4):787-92. DOI 10.1016/0091-6749(94)90259-3

 

[4] Gamirova, A., Berbenyuk, A., Levina. D., Peshko, D., Simpson, M. R. et coll. (2022). Food proteins in human breast milk and probability of OgE-mediated allergic reaction in children during breastfeeding: A systematic review. The Journal of Allergy and Clinical Immunology, 10(5):1312-24. DOI 10.1016-j.jaip.2022.02.028

 

[5] Société canadienne de pédiatrie. (2021). Document de principes — L’exposition aux aliments et la prévention des allergies chez le nourrisson à haut risque. Repéré à https://cps.ca/fr/documents/position/lexposition-aux-aliments-et-la-prevention-des-allergies

 

[6] Azad, M., Dharma, C., Simons, E., Tran, M. et coll. (2020). Reduced peanut sensitization with maternal peanut consumption and early peanut introduction while breastfeeding. Journal of Developmental Origins of Health and Disease, 12(5):811-818. DOI 10.1017/S2040174420001129

 

[7] Davis, E. C., Castagna, V. P., Sela, D. A., Hillard, M. A., Lindberg, S. et coll. (2022). Gut microbiome and breast-feeding: Implications for early immune development. The Journal of Allergy and Clinical Immunology, 150(3):523-34. DOI 10.1016/j.jaci.2022.07.014