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La fratrie serait-elle un facteur de protection contre les allergies alimentaires

Fraterie et allergies

On sait depuis longtemps que l’apparition des allergies alimentaires dépend de plusieurs facteurs génétiques, immunitaires et environnementaux. Les mécanismes en œuvre demeurent toutefois flous malgré les nombreuses études menées sur le sujet. Récemment, des chercheurs australiens ont fait le point sur l’un de ces facteurs : la fratrie. Qu’en est-il au juste ?

Des frères, des sœurs et des allergies

Les experts ont depuis longtemps observé que les nouveau-nés ayant des frères et sœurs étaient moins susceptibles de développer une maladie allergique. Pourtant, ils ne savaient pas trop ce qui expliquait cette donnée. Voulant en avoir le cœur net, des chercheurs australiens ont examiné l’influence de la fratrie sur le risque de présenter une maladie allergique à un an [1].

Dans leur étude, parue dans le Journal of Allergy and Clinical Immunology, Gao et son équipe ont analysé des échantillons de selles collectés chez 1 074 bébés à l’âge de 1, 6 et 12 mois. Pour évaluer le lien entre l’allergie alimentaire et la présence de frères et sœurs, les chercheurs ont déterminé l’âge de maturation du microbiote pour chaque enfant et validé le diagnostic d’une allergie alimentaire à 12 mois (confirmé par un test cutané et un test de provocation orale).

Quelques mots sur l’hypothèse hygiénique

Au cours des dernières décennies, le nettoyage et la désinfection se sont intégrés à notre routine quotidienne. On empêche bébé de manger du sable à la plage, on lave ses jouets sur une base régulière et on désinfecte les surfaces lorsqu’un membre de la famille est malade afin de limiter la propagation de l’infection.

Pourtant, en diminuant notre exposition aux virus et aux bactéries qui nous rendent malades, on réduit également nos contacts avec les bonnes bactéries qui composent notamment notre microbiote, aussi appelé flore intestinale.

La situation est loin d’être catastrophique pour la grande majorité de la population. Mais pour les enfants, particulièrement ceux qui ont moins d’un an, cette propreté de l’environnement aurait un impact sur la maturation du microbiote intestinal. Ce faisant, en réduisant l’exposition aux microbes présents dans l’environnement pendant la première année de vie, le risque de développer une maladie allergique augmenterait [2].

L’hypothèse hygiénique propose d’un autre côté des facteurs de protection qui permettraient de diversifier la flore intestinale. On retrouve parmi ces facteurs l’accouchement vaginal et l’allaitement du bébé, mais aussi le fait, pour le nouveau-né, d’avoir des frères et sœurs [2].  

Leurs résultats montrent qu’à l’âge d’un an, les enfants ayant une fratrie plus âgée étaient moins susceptibles d’être allergiques à un ou à plusieurs aliments. D’ailleurs, plus le nombre de frère et sœurs était grand, plus le bébé était protégé.

Une question de microbiote

C’est au cours de la première année d’existence que se développe le plus rapidement le microbiote intestinal. En gros, plus le bébé est exposé à des micro-organismes pendant ses premiers mois de vie, plus sa flore intestinale se diversifie. Or, on peut donc penser que le fait d’avoir des frères et sœurs permettrait d’y être exposé davantage que lorsqu’on est enfant unique.

En se basant sur le fait que les bactéries de l’intestin jouent un rôle important dans le développement du système immunitaire, l’équipe de recherche a calculé l’âge de maturation de la flore intestinale pour chaque enfant à l’étude. Ils ont observé un effet protecteur de la maturation du microbiote à l’âge d’un an. Ainsi, plus l’âge calculé du microbiote était grand, plus le bébé était protégé et moins il était susceptible de développer une allergie alimentaire. Au contraire, les enfants ayant reçu un diagnostic d’allergie alimentaire à l’âge d’un an avaient un microbiote moins mature que les autres au même âge.

Mais quel est le lien avec les frères et sœurs ? Les chercheurs ont estimé que 63 % de l’effet protecteur découlant de la maturation du microbiote intestinal était associé au fait d’avoir une fratrie plus âgée.

Somme toute, même si les chercheurs australiens ne sont pas en mesure de confirmer si les résultats de leur étude sont généralisables à d’autres populations de bébés, la fratrie est incontestablement un facteur à considérer !

[1]  Gao, Y., Stokholm, J., O’Hely, M., Ponsonby, A. L., Tang, M. L. K., Ranganathan, S., Saffery, R., Harrison, L. C., Collier, F., Gray, L., Burgner, D., Molloy, J., Sly, P. D., Brix, S., Frøkiær, H., Vuillermin, P. et BIS Investigator Group. (2023). Gut microbiota maturity mediates the protective effect of siblings on food allergy. The Journal of Allergy and Clinical Immunology, 152(3), 667–675. https://doi.org/10.1016/j.jaci.2023.02.034

[2]   Munyaka, P. M., Khafipour, E. et Ghia, J. E. (2014). External influence of early childhood establishment of gut microbiota and subsequent health implications. Frontiers in pediatrics, 2, 109. https://doi.org/10.3389/fped.2014.00109