Faut-il se méfier des tests d’intolérance alimentaire?

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On entend souvent parler des tests d’intolérance alimentaire. Comment fonctionnent-ils ? Peut-on s’y fier ? Allergies Québec a exploré la question.

Ballonnements, maux de tête, diarrhées : ces symptômes sont couramment associés, à tort ou à raison, à une sensibilité, une intolérance ou une allergie alimentaire. Pour connaître le ou les aliments en cause, plusieurs se tournent aujourd’hui vers les tests d’intolérance alimentaire. Puisqu’ils ne demandent habituellement pas de référence d’un médecin, ces tests sont relativement faciles d’accès. Mais ils suscitent aussi la controverse dans la communauté médicale.

Distinguer l’intolérance alimentaire de l’allergie

Avant toute chose, prenons le temps de distinguer l’intolérance et l’allergie alimentaire. Même si toutes les deux constituent des « réactions alimentaires », il s’agit de réalités différentes que l’on confond encore trop souvent.     

En gros, on parle d’allergie alimentaire lorsque le système immunitaire d’une personne réagit exagérément à un aliment qui ne cause habituellement pas de problème. Le lait, les arachides et les noix figurent parmi les allergènes les plus courants.  

L’allergie alimentaire fait intervenir le système immunitaire en provoquant des symptômes de l’allergie. La réaction allergique qui s’ensuit est souvent sévère. Elle peut mener à l’anaphylaxie et même à la mort en l’absence de traitement.

De son côté, l’intolérance alimentaire n’implique pas le système immunitaire, mais plutôt le système digestif. Elle survient lorsque l’organisme est incapable de digérer un aliment ou l’une de ses composantes (p. ex, le lactose, le fructose ou la caféine).

L’intolérance alimentaire provoque des symptômes qui, même s’ils ne sont pas sévères, peuvent affecter grandement la qualité de vie. On parle notamment de ballonnements, de diarrhée, de nausées, mais aussi de fatigue et de maux de tête. Contrairement à l’allergie alimentaire, l’intolérance ne met pas la vie en danger.

Il revient au médecin d’établir un diagnostic d’intolérance ou d’allergie alimentaire grâce à des tests diagnostiques et à l’historique médical de la personne. Il est à noter que dans le cas des intolérances alimentaires, seule l’intolérance au lactose peut être diagnostiquée, puisqu’elle recourt à des tests validés et reconnus (p. ex., test à l’hydrogène, au lactose, test génétique). Ces tests évaluent la capacité de l’organisme à digérer le lactose. Le test à l’hydrogène, par exemple, mesure la quantité d’hydrogène expiré après avoir consommé une quantité déterminée de lactose. Chez la personne intolérante, le lactose n’est pas digéré et se transforme en hydrogène qui, après avoir rejoint la circulation sanguine, est expiré par les poumons.  

Des tests d’intolérance alimentaire qui mesurent les taux d’IgG

Depuis plusieurs années, certains laboratoires d’analyse offrent des tests d’intolérance alimentaire qui promettent d’identifier les sensibilités d’une personne à certains aliments, donc ses intolérances. On les appelle aussi, parfois à tort, tests d’allergies, même s’ils ne sont pas en mesure de diagnostiquer les allergies alimentaires.

Grâce à une simple prise de sang*, ces tests d’intolérance alimentaire mesurent les immunoglobulines G, ou IgG, associés à des centaines d’aliments différents. Par la suite, un rapport d’analyse des mesures d’IgG est produit. Ce dernier identifie les aliments dont les taux d’IgG sont les plus élevés, donc ceux auxquels l’individu serait « sensible », et recommande d’éliminer ces aliments de la diète. En procédant de la sorte, la personne verrait en théorie de nombreux symptômes s’améliorer, notamment ceux de plusieurs maladies comme la fibromyalgie, le diabète de type II, la maladie de Crohn, la dépression et l’hypertension artérielle.

* Il existe aussi des tests d’intolérance alimentaire basés sur l’analyse minérale des cheveux.

L’idée derrière les tests d’intolérance alimentaire aux IgG

Les tests d’intolérance alimentaire se basent sur des observations faites dans les années 1980 voulant que les IgG entraînent la libération d’histamine, ces molécules à l’origine des symptômes d’allergies. Par conséquent, si une personne a un taux d’IgG élevé pour un aliment, elle y serait intolérante.

Jusqu’à présent, aucune donnée scientifique ne confirme ces observations. Au contraire, la littérature suggère que la présence d’IgG serait plutôt liée au fait d’avoir été exposé à un aliment dans le passé [1]. On associe même dans certains cas un taux élevé de certains IgG à l’apparition d’une tolérance à un aliment. C’est le cas par exemple chez ceux et celles qui ont complété une immunothérapie, laquelle permet d’induire progressivement une tolérance à un allergène.

Gare aux tests d’intolérance alimentaire aux IgG, disent les experts

Même s’ils semblent prometteurs, les tests d’intolérance alimentaire demeurent controversés. Le Collège des médecins du Québec (CMQ), l’Association des allergologues et immunologues du Québec (AAIQ), de même que d’autres organisations reconnues à travers le monde ont d’ailleurs publié des mises en garde à la population au sujet de ces tests aux IgG.

En gros, la communauté médicale souligne qu’il « n’existe pas de donnée scientifique valable pour appuyer l’utilisation de ces tests dans l’investigation d’une allergie ou d’une intolérance alimentaire, ou de tout autre syndrome clinique » (CMQ, 2016).

On précise également que l’interprétation des résultats de ces tests d’intolérance alimentaire porte à confusion. Ils pourraient en effet mener certaines personnes à éliminer inutilement de leur diète plusieurs aliments pourtant bien tolérés. Par conséquent, au lieu de soulager des symptômes, ils seraient susceptibles d’entraîner des carences alimentaires, en plus de rendre très complexe la planification des menus. Dans certains cas, ces tests pourraient même aller jusqu’à provoquer de l’anxiété et une peur de s’alimenter.    

Un mot sur le dosage des IgE

Le dosage des IgE constitue l’un des outils permettant de poser un diagnostic d’allergies alimentaires. Il est cependant rarement utilisé seul pour établir un tel diagnostic. En effet, certaines personnes peuvent avoir des taux élevés d’un IgE spécifique à un aliment sans pour autant réagir lorsqu’ils en mangent. C’est pourquoi le diagnostic d’une allergie alimentaire est établi par un médecin et inclut plusieurs étapes, dont l’historique médical du patient, le dosage des IgE (test sanguin), le test de provocation orale et le test cutané (prick test).

En terminant, si vous croyez être intolérant ou allergique à un ou plusieurs aliments, discutez-en plutôt avec votre médecin ou votre allergologue.