Le parcours de Marie avec ses enfants polyallergiques
Allergies Québec est récemment allé à la rencontre de Marie, bénévole pour l’organisation et maman de trois enfants, dont deux sont polyallergiques. En plus d’être touchés par son témoignage de Maman, nous avons été émus de savoir combien notre travail a pu contribuer à son bienêtre et celui de ses enfants! Merci Marie pour tes bons mots et ton partage!
Allergies Québec – Parlez-nous un peu de vos enfants.
Marie – Ce sont des enfants curieux, drôles et pleins de vie ! Ma grande fille, Estelle, a 7 ans. Elle a des allergies alimentaires sévères à plusieurs des principaux allergènes. Ma deuxième fille, Nora, a 5 ans et n’a aucune allergie alimentaire. Mon fils Jules, qui a 2 ans, a reçu un diagnostic de 16 allergies alimentaires, certaines à des allergènes prioritaires et d’autres à des allergènes moins fréquents. Les allergies ont beaucoup de répercussions sur la gestion de notre quotidien.
Allergies Québec – À quel moment avez-vous soupçonné que Jules et Estelle avaient des allergies alimentaires ?
Marie – Estelle avait 2 ans lorsqu’on a découvert ses allergies. Elle avait mangé un poulet avec une sauce aux arachides et quelques petites taches étaient apparues près de sa bouche, même si elle avait mangé ce plat plusieurs fois auparavant. À l’époque, les allergies alimentaires, c’était un concept flou pour nous. On ne connaissait pas forcément tous les symptômes d’une réaction allergique, mais on savait qu’elles pouvaient être dangereuses. On a trouvé la réaction bizarre, mais on n’en a pas fait de cas… jusqu’à ce qu’on mange dans un restaurant quelques mois plus tard. Estelle y a mangé quelque chose qui l’a fait beaucoup réagir. Rapidement, ses lèvres se sont mises à gonfler et de grosses plaques sont apparues sur son visage. Pendant le trajet pour se rendre à l’urgence, Estelle a vomi.
Heureusement, on était à quelques minutes à peine de l’hôpital et, avant même de sortir de l’auto, son état s’était stabilisé et amélioré. Estelle est restée en observation quelques heures et on nous a remis une référence en allergologie.
Avec Jules, on a découvert qu’il était allergique dès l’introduction des aliments solides, avant l’âge d’un an. À ce moment-là, on était mieux outillés à faire face aux allergies alimentaires, on avait plus de connaissances. On était donc plus à l’affût des symptômes et on a pu déceler les allergies rapidement. Contrairement à sa sœur, Jules n’a pas eu de réaction allergique aussi sévère. Il a reçu un diagnostic de neuf allergies alimentaires lors de ses premiers tests cutanés. Les autres ont été diagnostiquées plus tard.
Allergies Québec – Qu’avez-vous ressenti lorsqu’Estelle a subi sa première réaction allergique sévère ?
« On était paniqués et déstabilisés. On ne savait pas trop quoi faire et l’enjeu était tellement important ! C’est ton enfant, sa santé, sa vie… On sentait que quelque chose n’allait pas, qu’on devait faire quelque chose, mais on ne savait pas quoi et on n’avait pas d’outils, pas de médication. »
En quittant l’hôpital, on était en état de choc, on ne savait pas vraiment quoi faire. Ce fut très déstabilisant, on se sentait très démunis et on ne savait pas par où commencer. J’ai probablement subi un choc post-traumatique à la suite de cet événement. J’ai heureusement été accompagnée par des professionnels depuis et ça va beaucoup mieux.
Allergies Québec – Comment avez-vous reçu le diagnostic d’allergies alimentaires de vos enfants ?
Marie – Pour Estelle, ce fut un bouleversement. On a rencontré le médecin pour les allergies d’Estelle alors que Nora avait un mois. On nous a recommandé d’éviter toute trace de ses allergènes parce que ses allergies étaient très sévères et remis une prescription pour un auto-injecteur ainsi qu’un aide-mémoire des moments où on doit l’utiliser. De retour à la maison, on est entrés en mode survie, on éteignait les feux qui se présentaient.
Ce qui a été déstabilisant avec le diagnostic de Jules, c’est le nombre impressionnant d’aliments à éviter et le fait que certains se retrouvent dans presque tous les produits transformés. Il a fallu adapter notre façon de s’alimenter et on a perdu beaucoup de liberté et de spontanéité dans notre style de vie. Ce fut un deuil à faire, mais on a réussi à s’adapter depuis.
Allergies Québec – Quel a été votre cheminement d’adaptation après avoir reçu le diagnostic d’allergies alimentaires pour votre fille ?
Marie – Ce fut très difficile au début. On n’avait pas reçu beaucoup d’informations à l’urgence ou à la clinique. Il aurait fallu qu’on pose plus de questions, mais les sources de questionnements sont arrivées une fois que l’on a été confronté à la réalité du quotidien. C’est difficile de se projeter dans le futur et d’anticiper nos besoins quand on est en état de choc. C’est tellement gros comme univers, les allergies alimentaires, et l’enjeu est tellement important parce que c’est la santé de ton enfant. Tout devenait une source de questionnements et on cherchait nos repères. Sans accompagnement, on s’est vite sentis submergés et isolés.
J’essayais de trouver de l’information sur internet, mais les sources que je consultais se contredisaient souvent. Je ne savais pas sur quel pied danser, la situation générait beaucoup d’anxiété chez moi. Alors, on y est allé petit à petit, on a cherché des réponses et de l’information au fur et à mesure qu’on rencontrait une nouvelle situation.
Au début, on a vraiment appris au compte-gouttes, par essais-erreurs. On a fini par trouver ce qui fonctionnait ou pas avec Estelle, selon son âge, et dans notre réalité familiale. Plus on trouvait nos points de repère, plus on retrouvait un sentiment de normalité. Avec les allergies de Jules, c’était plus facile, car on avait déjà pris de bonnes habitudes pour assurer la sécurité alimentaire d’Estelle. On a cependant eu besoin d’élargir beaucoup la liste des aliments non sécuritaires. Aussi, avec le temps, j’ai appris à mieux exprimer mes besoins envers les professionnels de la santé, ce qui fait que les suivis en lien avec les allergies alimentaires ont été de plus en plus efficaces.
Sans vous, nos activités de sensibilisation et
programmes d’aide gratuits ne sont pas possibles.
Allergies Québec – Dans quelle mesure Allergies Québec vous a-t-il aidé dans votre adaptation à la réalité des allergies alimentaires ?
Marie – Au travers de mes recherches, je suis tombée sur le site d’Allergies Québec et j’y ai découvert les fiches d’allergènes prioritaires qui ont vraiment simplifié mon quotidien. J’ai imprimé les fiches, d’abord pour Estelle et plus tard pour Jules, et on s’y référait tout le temps au début. Elles sont d’ailleurs encore sur le côté de mon frigo pour un usage ponctuel ! On y a aussi trouvé de l’information pour mieux comprendre et lire les étiquettes des ingrédients.
Avec les années, j’ai trouvé sur le site de nombreux repères qui nous ont aidés à mieux nous adapter à notre nouvelle réalité. Chaque fois qu’une nouvelle situation se présentait (entrée à la garderie, vacances en familles, entrée à l’école, etc.), j’allais consulter le site pour voir s’il n’y avait pas quelque chose de publié sur le sujet. Aussi, j’y ai trouvé des trucs pour sortir de l’isolement et pour faire de la sensibilisation auprès de notre famille. Je me suis d’ailleurs souvent servi d’articles et de témoignages publiés sur le site d’Allergies Québec pour faire de la sensibilisation autour de moi. Ces témoignages m’ont aussi permis de me normaliser en tant que parent d’enfant allergique et de voir par où d’autres comme nous sont passés. J’ai aussi reçu beaucoup d’information via l’infolettre et ça me permet de voir rapidement s’il y a de nouvelles informations pertinentes pour notre réalité familiale. C’est aussi comme ça que je suis tombée sur un article et un témoignage sur les phobies alimentaires. Ceux-ci m’ont permis d’ouvrir le dialogue avec Estelle et mettre des choses en place pour éviter qu’elle ne développe de l’anxiété en lien avec ses allergies alimentaires.
J’y ai découvert le service de parrainage et j’en ai bénéficié. Le contact avec ma marraine a été parfait. Nos situations étaient similaires, à quelques années d’écart. J’ai été tellement soulagée de voir son parcours avec les allergies alimentaires et de pouvoir faire des parallèles avec le mien. J’ai pu lui poser plein de questions sur ses expériences avec les nombreuses allergies alimentaires de son fils et les traitements de désensibilisation. Elle m’a aussi donné beaucoup de trucs en lien avec les collations spéciales à l’école, les fêtes d’amis, l’Halloween, Pâques… Bref, le parrainage m’a énormément aidé. J’ai aussi utilisé la ligne de soutien après avoir reçu le diagnostic de Jules. J’ai alors pu discuter avec une nutritionniste. Elle m’a donné des trucs concrets pour mieux gérer les allergies de mes enfants et m’a rassurée.
L’automne dernier, Allergies Québec nous a sollicités pour envoyer des lettres à nos députés afin de les sensibiliser aux allergies alimentaires. J’ai sollicité absolument tout mon entourage pour qu’il participe à la démarche et plusieurs m’ont contactée pour me dire qu’ils l’avaient fait. Certains m’ont envoyé une copie de leur lettre adaptée dans laquelle ils insistaient sur l’importance de la sécurité des enfants allergiques dans les écoles au Québec. Ça m’a beaucoup touché de voir autant de gens se mettre en action, je me suis sentie particulièrement soutenue à ce moment.
Allergies Québec – Auriez-vous des suggestions pour améliorer les services d’Allergies Québec ?
« J’aurais aimé que quelqu’un me dirige vers Allergies Québec dès la première réaction allergique de ma fille et à chaque nouvelle étape du processus. Quand on est en état de choc, on a souvent besoin d’être guidé. C’est important de pouvoir être dirigé rapidement vers des sources fiables... »
Je pense donc qu’il serait intéressant de faire connaître Allergies Québec à tous les professionnels de la santé susceptibles de rencontrer des parents et des patients qui vivent une première réaction ou qui viennent de recevoir un diagnostic d’allergies alimentaires, et que les gens soient informés de la fiabilité et du type d’informations qu’ils peuvent y trouver. De cette manière, ils seraient mieux outillés pour faire face à leur nouvelle réalité.
De la part de toute l’équipe d’Allergies Québec, merci beaucoup, Marie, d’avoir accepté de partager votre parcours avec nous!
Sans vous, nos activités de sensibilisation et
programmes d’aide gratuits ne sont pas possibles.
Allergies Québec offre des programmes d’aide aux personnes touchées par les allergies alimentaires, mais également des outils pour les professionnels de la santé qui les traitent. Nous poursuivons nos efforts pour diffuser ces ressources! Aidez-nous à les partager en faisant un don ou en transmettant cet article à votre réseau.