Anaphylaxie et hospitalisations infantiles : conclusions d’une étude
L’administration rapide d’épinéphrine réduirait le risque de séjour aux soins intensifs chez les enfants allergiques, selon une étude.
Une réaction allergique sévère peut évoluer en quelques minutes vers l’anaphylaxie, une urgence médicale potentiellement fatale. Lorsque cela se produit, l’administration de l’épinéphrine demeure le seul traitement capable de contrer les symptômes de la réaction et d’en freiner la progression.
Mais saviez-vous que l’administration rapide d’épinéphrine chez l’enfant vivant une réaction anaphylactique peut également réduire le risque d’hospitalisation aux soins intensifs? C’est ce que démontre une récente étude menée à l’Hôpital de Montréal pour enfant [1].
Moins d’admissions aux soins intensifs
Pour en arriver à ces résultats, Moshe Ben-Shoshan et son équipe du Centre universitaire de santé McGill, à Montréal, ont analysé les dossiers de plus de 3 000 patients âgés de 18 ans ou moins s’étant présentés à l’Hôpital de Montréal pour enfants avec une réaction anaphylactique entre avril 2011 et novembre 2023. Les participants ont été répartis en deux groupes, soit ceux qui avaient reçu une injection d’épinéphrine avant leur arrivée à l’hôpital et ceux qui n’en avaient pas reçu.
L’analyse des dossiers des participants a montré que, lors d’une réaction anaphylactique, les enfants qui avaient reçu une injection d’épinéphrine avant leur arrivée à l’hôpital (44 % des participants) étaient moins susceptibles d’être admis aux soins intensifs* que ceux qui n’en avaient pas reçu. Le risque d’hospitalisation aux soins intensifs était en effet deux fois plus grand chez les enfants n’ayant pas reçu d’épinéphrine avant d’arriver à l’hôpital et s’établissait à 1,6 %, contre 0,7 % pour ceux ayant reçu le médicament (voir encadré). Ces résultats renforcent les recommandations internationales à l’effet que l’administration rapide d’épinéphrine en cas de réaction allergique sévère permet de réduire le risque de complications et de décès [2].
*Les soins intensifs sont un département hospitalier où les personnes hospitalisées bénéficient d’une surveillance médicale constante en raison de leur état de santé grave ou instable (p. ex. une personne présentant des difficultés respiratoires et dont l’état doit être surveillée de près).
L’étude montre également d’autres résultats intéressants. Par exemple, chez les participants ayant reçu de l’épinéphrine avant leur arrivée au centre hospitalier, la majorité (79 %) avait une allergie alimentaire connue avant la survenue de la réaction anaphylactique, comparativement à 42,8 % chez ceux qui n’avaient pas reçu d’épinéphrine. Par ailleurs, les enfants à qui l’on avait administré rapidement de l’épinéphrine étaient plus vieux (7,3 ans contre 5 ans, en moyenne). Ils étaient aussi davantage susceptibles d’être asthmatiques (18,6 % contre 13,9 %) et de présenter un eczéma (17,1 % contre 14,5 %).
Réduire les biais grâce aux statistiques
Pour isoler l’effet réel de l’épinéphrine, les chercheurs ont utilisé une méthode statistique appelée « correspondance du score de propension ». Cette méthode permet de contrôler des variables qui peuvent influencer la probabilité, pour le participant présentant une réaction anaphylactique, de recevoir l’épinéphrine. Parmi ces facteurs, on retrouve notamment l’âge, la sévérité de la réaction, le fait que l’allergie soit ou non connue au moment de la réaction, ou encore le fait que la réaction se soit déclarée ou non à la maison.
Lorsque chaque minute compte…
Rappelons-le, l’épinéphrine est le seul traitement capable de freiner une réaction anaphylactique. Plus son administration est retardée, plus la réaction peut être difficile à contrôler, et plus le risque de complications graves et de fatalités augmente.
Lorsqu’une réaction allergique se déclenche et que des symptômes de l’anaphylaxie apparaissent, chaque minute compte! Si vous ou votre enfant vivez avec des allergies alimentaires, rappelez-vous que l’épinéphrine doit être administré le plus rapidement possible si :
- Deux systèmes du corps sont touchés (p. ex., nez et yeux, peau, système digestif, poumons, bouche, cœur, etc.), et ce, même si les symptômes sont légers.
- Un seul symptôme grave est présent (p. ex., respiration sifflante, enflure marquée de la langue et/ou des lèvres, urticaire sur tout le corps, vomissements à répétition, etc.).
Une fois l’épinéphrine administrée, appelez le 911 afin de faire transporter immédiatement la personne à l’hôpital.
Notez bien : l’épinéphrine ne présente aucun danger pour la santé. Le transport de la personne à l’hôpital vise à s’assurer que celle-ci reçoive les soins médicaux nécessaires pour traiter la réaction anaphylactique en cas de besoin.
Pour plus d’informations sur l’anaphylaxie et son traitement, consultez la fiche Les symptômes de l’anaphylaxie.
Somme toute, cette étude montréalaise souligne l’importance d’administrer le plus rapidement possible l’épinéphrine en cas de réaction anaphylactique. Elle rappelle également aux personnes allergiques de toujours avoir leur auto-injecteur à portée de main et, surtout, de l’utiliser sans délai si une réaction allergique sévère se déclenche. L’administration rapide de l’auto-injecteur d’épinéphrine pourrait vous sauver la vie en cas de réaction anaphylactique! N’hésitez pas à l’utiliser!
Références
[1] Khalaf, R., Prosty, C., Clarke, A. E., McCusker, C., Bretholz, A. et Ben-Shoshan, M. (2025). Outpatient epinephrine administration reduces ICU admission rates in anaphylactic reactions: A propensity score-matched cohort. The Journal of Allergy and Clinical Immunology, 13(3), 689–691. https://doi.org/10.1016/j.jaip.2024.12.020
[2] Kemp, S. F., Lockey, R. F., Simons, F. E. et World Allergy Organization ad hoc Committee on Epinephrine in Anaphylaxis (2008). Epinephrine: the drug of choice for anaphylaxis. A statement of the World Allergy Organization. Allergy, 63(8), 1061-1070. https://doi.org/10.1111/j.1398-9995.2008.01733.x