Le test de provocation orale sous la loupe
Par Katia Vermette
Le test de provocation orale est considéré comme l’outil par excellence pour confirmer la présence ou la résolution d’une allergie alimentaire. En quoi consiste ce test et dans quelles circonstances les allergologues le prescrivent-ils?
L’établissement d’un diagnostic d’allergie alimentaire n’est pas une science exacte. Tout débute avec l’historique du patient chez qui l’on soupçonne une allergie. Si le médecin juge que le lien entre la réaction et la consommation d’un aliment est concluant, l’investigation est poursuivie avec les tests d’allergies percutanés et/ou la mesure du taux d’IgE par des analyses sanguines. Et ce n’est qu’après que le test de provocation orale peut être considéré.
Le test de provocation orale
Le test de provocation orale consiste à administrer par la bouche un aliment auquel on soupçonne la personne d’être allergique. On commence par de faibles quantités de l’aliment, lesquelles sont augmentées progressivement pendant l’examen.
Les allergologues auront recours au test de provocation orale pour deux principales raisons :
- Pour confirmer un diagnostic d’allergie alimentaire, lorsqu’il subsiste des doutes après avoir complété l’historique du patient et réalisé les tests percutanés et/ou sanguins;
- Pour confirmer la résolution d’une allergie alimentaire chez un patient.
Il faut savoir que le test de provocation orale ne constitue pas la base du diagnostic de l’allergie alimentaire. Il s’agit plutôt de la dernière étape d’un processus complexe d’analyses qui a pour but de confirmer ou non les doutes d’un allergologue quant à la présence d’une allergie ou sa résolution. En effet, la mesure du taux sanguin d’IgE et les tests d’allergies percutanés, même s’ils peuvent déterminer si une personne est sensibilisée à un aliment donné, ne permettent pas à tout coup de prédire la survenue d’une réaction allergique et sa sévérité[1][2].
Un test sécuritaire
Même si plusieurs le craignent, le test de provocation orale est considéré comme sécuritaire lorsqu’il est effectué sous supervision médicale, dans un établissement où l’anaphylaxie peut être rapidement traitée si elle survient.
D’ailleurs, un examen rétrospectif des dossiers des patients ayant effectué un test de provocation orale au Jaffe Food Allergy Institute aux États-Unis a montré que les réactions allergiques étaient survenues chez 19 % des patients et que ces réactions étaient majoritairement cutanées[3]. L’administration d’épinéphrine fut nécessaire chez seulement 2 % de ces patients lors du test de provocation orale. Selon les auteurs, cette proportion serait égale ou inférieure à celle observée dans les traitements d’immunothérapie orale.
Tester les allergènes cuits
On sait que certaines allergies alimentaires diagnostiquées pendant l’enfance disparaissent avec l’âge. C’est le cas par exemple des allergies au lait et aux œufs, pour lesquelles 50 % des enfants développeront une tolérance avant l’âge de 5 ou 6 ans[4][5].
En outre, il est reconnu que jusqu’à 70 % des enfants allergiques au lait et aux œufs peuvent tolérer de petites quantités de ces allergènes lorsqu’ils sont cuits et intégrés à une recette. En effet, la chaleur entraîne la modification de la configuration de certains allergènes, ce qui rend plus difficile leur reconnaissance par les IgE.
À lire : La transformation des aliments et l’allergie alimentaire
Dans cette optique, il est possible que les allergologues recommandent à certains patients de procéder à un test de provocation orale pour déterminer leur niveau de tolérance à l’allergène cuit. La réintroduction, dans la diète de l’enfant, de l’aliment sous sa forme cuite et intégrée à une recette permettrait d’accélérer dans certains cas le développement d’une tolérance à l’aliment cru[6].
Bref, en attendant le développement d’examens plus fiables pour diagnostiquer l’allergie alimentaire, le test de provocation orale demeure un incontournable dans la confirmation du diagnostic ou de la résolution de l’allergie alimentaire.
À lire aussi :
- Allergie ou intolérance alimentaires?
- Dossier sur les allergènes prioritaires : le lait de vache
- Dossier sur les œufs
- Peut-on réduire le risque des allergies alimentaires chez le nourrisson?
[1] Abraham, E. et Sicherer, S. H. (2016). Diagnosis and management of food allergy. CMAJ, 188(15):1087-1093.
[2] Bégin, P. et Nadeau, K. C. (2013). Diagnosis of food allergy. Pediatric Annals, 42(6):102-109
[3] Lieberman, J. A. et coll. (2011). Outcomes of office-based, open food challenges in the management of food allergy. Journal of Allergy and Clinical Immunology, 128(5):1120-1122.
[4] Sicherer, S. H. et coll. (2014). The natural history of egg allergy in an observational study. Journal of Allergy and Clinical Immunology, 133:492-499.
[5] Wood, R. A. et coll. (2013). The natural history of IgE-mediated cow’s milk allergy. Journal of Allergy and Clinical Immunology, 131:805-812.
[6] Bégin, P. et Nadeau, K. C. (2013). Diagnosis of food allergy. Pediatric Annals, 42(6):102-109