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Pourquoi développe-t-on des allergies alimentaires à l’âge adulte ?

Alors que dans bien des cas l’enfant acquerra une tolérance à un aliment auquel il est allergique, il est plutôt rare qu’une allergie alimentaire se développe à l’âge adulte. Pourtant, il s’agit bel et bien d’une réalité…

Dans les années 1970, une jeune femme de 22 ans présente à plusieurs reprises une réaction allergique sévère après avoir mangé des œufs ou du lait de vache[1].

En 1999, une femme de 28 ans se rend à l’urgence pour traiter une réaction anaphylactique alors qu’elle vient de consommer des raisins verts[2].

Entre 2005 et 2007, une femme de 55 ans affirme s’être rendue à plusieurs reprises à l’hôpital pour des difficultés respiratoires et une enflure des paupières et des lèvres après avoir mangé des œufs ou des aliments qui en contiennent[3].

Ces trois cas n’ont d’emblée rien d’exceptionnel. Or, les trois femmes avaient une chose en commun : avant leurs réactions allergiques, elles avaient consommé toute leur vie et sans problème des œufs, du lait de vache et des raisins verts.

Plus d’allergies alimentaires chez les adultes

Alors que le nombre d’enfants vivant avec des allergies alimentaires est en augmentation aux quatre coins du monde, il semblerait que la tendance soit également à la hausse chez les adultes.

En 2017, lors du congrès annuel de l’American College of Allergy, Asthma and Immunology (ACAAI), la docteur Richi Gupta et son équipe ont présenté les résultats d’un sondage réalisé auprès de plus de 40 000 adultes américains entre octobre 2015 et septembre 2016[4]. Les données obtenues montrent que près de la moitié (45,3 %) des personnes sondées ont développé au moins une allergie alimentaire après l’âge de 18 ans. Parmi ces personnes, le quart (24,9 %) n’avait aucune allergie alimentaire connue avant le diagnostic.

Cette tendance avait été observée deux ans plus tôt, en 2015, par d’autres chercheurs américains. Ces derniers avaient alors analysé les dossiers de 1 111 adultes rencontrés par des allergologues pratiquant dans les cliniques d’allergie de la Northwestern University[5].

L’analyse de ces dossiers a révélé qu’au moins 15 % des individus avaient développé une allergie alimentaire après l’âge de 18 ans, avec un âge moyen de 31 ans lors de la première réaction. Les aliments les plus souvent en cause étaient les fruits de mer (54 %), les noix (43 %), les poissons (15 %), le soya (13 %) et les arachides (9 %).

Pourquoi les adultes développent-ils des allergies alimentaires?

Les données disponibles sur le développement d’une allergie alimentaire à l’âge adulte sont éparses et peu nombreuses. On reconnaît certes le syndrome de l’allergie orale et l’anaphylaxie induite par l’exercice parmi les manifestations de l’allergie alimentaire fréquemment observées dans la population adulte. Mais ce qui provoque le développement d’une allergie alimentaire après l’âge de 18 ans demeure un mystère, encore aujourd’hui.

Les études américaines citées plus haut amènent cependant des données intéressantes sur les facteurs de risque associés au développement de l’allergie alimentaire chez l’adulte. On a notamment observé que les adultes qui devenaient allergiques à un ou à plusieurs aliments présentaient souvent une rhinite allergique ou une dermatite atopique. Certains facteurs comme le sexe féminin et la présence d’autres allergies alimentaires ont également été associés à l’apparition de réactions allergiques suivant la consommation d’un aliment qui était auparavant toléré. Fait intéressant : plus l’allergie se déclare tard dans la vie d’un individu, plus le risque de présenter des réactions sévères serait grand.

Des hypothèses ont été avancées pour expliquer le développement de l’allergie alimentaire chez l’adulte. On parle par exemple de la génétique, du manque de vitamine D et de l’environnement de plus en plus pollué dans lequel nous évoluons. Une perte de tolérance du système immunitaire à un aliment spécifique, une infection virale ou le fait de vivre un événement important (ex. : un deuil) pourrait également entrer en ligne de compte (références 1 et 3) et favoriser l’apparition d’une allergie alimentaire. Il faudra toutefois attendre le résultat d’études plus poussées pour en avoir le cœur net.

Par Katia Vermette, rédactrice agréée

[1] Barnetson, R. S., Hardie, R. A. et Merrett, T. G. (1981). Late-onset atopic aczema and multiple food allergies after infectious mononucleosis. British Medical Journal, 283(6299):1086–1087.
[2] Vaswani, S. K. et coll. (1999). Adult onset grape hypersensitivity causing life threatening anaphylaxis. Annals of Allergy, Asthma & Immunology, 83:25-26.
[3] Ünsel, M. et coll. (2007). New onset egg allergy in an adult. Journal of Investigational Allergology and Clinical Immunology, 17(1):55-58.
[4] Warren, C. et coll. (2018). Prevalence, severity, and distribution of adult-onset food allergy. Annals of Allergy, Asthma & Immunology, 121(5 suppl.):S14.
[5] Kamdar, T. A. et coll. (2015). Prevalence and characteristics of adult-onset food allergy. Journal of Allergy and Clinical Immunology Practice, 3(1):114-115.