Connaissez-vous l’anaphylaxie induite par l’exercice?

Par Katia Vermette, rédactrice

Par un matin ensoleillé, vous sortez faire votre course à pied afin de profiter de la fraîcheur matinale. Après quelques minutes, vous commencez à ressentir des fourmillements dans les doigts. Bizarre, vous dites-vous? Rapidement, vous avez de la difficulté à respirer et devez vous arrêter. Les nausées font leur apparition, vous vous sentez de plus en plus faible et l’air peine à se rendre à vos poumons. Vous faites une réaction anaphylactique. Oui, mais à quoi?

Parmi les facteurs pouvant déclencher une anaphylaxie, on retrouve évidemment les allergènes alimentaires et les piqûres d’insectes. Mais, étonnamment, l’exercice peut aussi induire ce type de réaction potentiellement fatale. C’est ce que l’on appelle l’anaphylaxie induite par l’exercice (AIE).

Qui aurait cru qu’un entraînement pouvait présenter un si grand danger? Voyons voir plus en détail de quoi il s’agit.

1. L’AIE est une réaction relativement rare, mais imprévisible

L’anaphylaxie induite par l’exercice est peu fréquente, représentant environ 5 % à 15 % de tous les épisodes rapportés d’anaphylaxie [1]. Mais, comme pour toutes les réactions anaphylactiques, l’AIE est grave et potentiellement fatale.

Il s’agit d’une réaction imprévisible qui se développe la plupart du temps lors d’un exercice physique intense comme la course à pied ou l’aérobie. La plupart du temps, mais pas toujours. En effet, des cas d’AIE ont été rapportés chez des individus qui pratiquaient des d’activités de faible intensité : ils marchaient ou jardinaient [2, 3]. Heureusement, l’AIE n’apparaît pas systématiquement lors de chaque activité physique.

2. L’AIE peut se présenter chez n’importe qui, peu importe l’âge ou le sexe

Affectant des individus de tous âges, l’AIE s’observe autant chez l’homme que chez la femme. Et, bien qu’elle ne disparaisse pas avec le temps, on remarque que les épisodes tendent à s’espacer en vieillissant [2].

On ne connaît pas avec certitude les causes de l’AIE. Les données montrent toutefois que ce type d’anaphylaxie apparaît souvent chez des individus atopiques. De plus, l’AIE pourrait être héréditaire dans certains cas [2].

3. L’AIE présente des symptômes similaires à l’anaphylaxie alimentaire

Parmi les symptômes caractéristiques de l’AIE, on retrouve par exemple des difficultés respiratoires, des crampes abdominales, des vomissements, de l’urticaire, une chute de pression artérielle.

De manière générale, la réaction tend à se produire 30 minutes après le début de l’exercice, même si elle peut apparaître à n’importe quel moment pendant la séance d’exercice et jusqu’à quelques heures après [1, 2]. Il est également possible d’observer une réaction biphasique, au cours de laquelle les symptômes réapparaîtront dans les 24 à 48 heures suivant l’épisode initial [2].

4. Certains facteurs peuvent précipiter l’AIE

Bien que l’exercice physique puisse être le seul facteur en cause, l’AIE requiert souvent une exposition préalable à un facteur précipitant afin de se développer. Parmi ces facteurs, notons les médicaments, le cycle menstruel et les aliments.

Dans 30 % à 50 % des cas, l’AIE se développerait si un individu consomme un aliment bien précis avant sa séance d’exercice, aliment pour lequel il n’est pas allergique [2]. On appelle cette réaction l’anaphylaxie induite par l’exercice et l’ingestion d’aliment. Et, pour compliquer les choses encore un peu plus, la liste des aliments associés à l’apparition d’une AIE ne cesse de s’allonger : blé, raisins, noix, pêches, riz, tomates, lait, maïs, porc, oignons et champignons, pour ne nommer que ceux-ci.

5. On ne comprend toujours pas comment l’exercice peut entraîner une réaction anaphylactique

Quelques hypothèses ont été avancées quant aux mécanismes d’action sous-jacents à l’anaphylaxie induite par l’exercice et l’ingestion d’aliments [3]. Par exemple, il se pourrait que l’activité physique modifie la perméabilité de l’intestin, permettant ainsi à l’allergène alimentaire de circuler plus rapidement dans l’organisme. On pense également que les mastocytes, responsables de la libération des médiateurs chimiques, pourraient répondre différemment à l’allergène en fonction de l’endroit où il se situe (muqueuse vs tissu conjonctif).

Quoi qu’il en soit, l’AIE constitue un problème de santé de plus en plus fréquent à l’échelle mondiale. Pour l’instant, le traitement consiste en l’évitement des facteurs précipitant la réaction anaphylactique. Par contre, dans bien des cas, ces facteurs sont difficilement identifiables. Chez les personnes présentant une AIE, la vigilance est donc de mise pour continuer à profiter des bienfaits de l’activité physique.

 

[1] Barg W. et coll. Exercise-induced anaphylaxis : an update on diagnosis and treatment. Curr Allergy Asthma Rep, Fév. 2011;11(1):45-51.
[2] Dascola C. P. et Caffarelli C. Exercise-induced anaphylaxis: a clinical review. Italian J Pediatrics, 2012;38:43.
[3] Ansley L. et coll. Pathophysiological mechanisms of exercise-induced anaphylaxis: an EAACI position statement. Eur J Aller Clin Immunol, 2015;70:1212-1221