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L’allergène porteur d’espoir, témoignage de Marie-Ève Marcil

Depuis quelques années, des pas de géant ont été franchis en recherche afin de mettre au point un traitement pour l’allergie alimentaire. Alors que l’on a longtemps considéré l’évitement comme étant la seule option envisageable pour les personnes allergiques, voilà que l’optimisme renaît grâce à l’allergène.

On fonde énormément d’espoir sur les traitements d’immunothérapie afin d’induire un état de tolérance chez les personnes vivant avec une allergie alimentaire. Et pour cause : le taux de succès tournerait autour de 80 % pour les différents types de désensibilisation[1],[2].

Pour Marie-Ève Marcil et son mari, l’efficacité du traitement a grandement penché dans la balance lorsqu’ils ont pris la décision d’enrôler leur fils Laurent dans une étude clinique portant sur l’immunothérapie épicutanée.

Laurent est allergique aux arachides, aux pistaches, aux noix de cajou, aux pacanes et aux noix du Brésil. Plus jeune, il devait aussi éviter les œufs. Sa vie a donc toujours tourné autour de la gestion de risque afin d’éviter, dans la mesure du possible, un contact accidentel avec les allergènes qui pourraient lui être fatals.

Du haut de ses 8 ans, Laurent est un candidat idéal pour l’immunothérapie épicutanée. L’efficacité de ce type de désensibilisation, qui utilise un timbre spécial appliqué directement sur la peau, semble en effet diminuer avec l’âge[3]. L’étude à laquelle Laurent participe était donc une chance à ne pas laisser filer. « L’allergie ne partira pas toute seule et, d’ici à ce que le produit soit commercialisé, Laurent sera plus vieux, » souligne sa mère. Le traitement risque donc d’être moins efficace.

Une étude sous le signe de l’optimisme

C’est en janvier dernier que Laurent a commencé un traitement de désensibilisation à l’hôpital Sainte-Justine. Il participe à l’étude clinique de phase 3 REALISE, qui vise à évaluer l’utilisation et l’innocuité du timbre Viaskin® Peanut 250 µg en pratique clinique courante chez 335 enfants de 4 à 11 ans en Amérique du Nord.

Pendant les six premiers mois de l’étude, Laurent et les autres participants ne sauront pas s’ils reçoivent le timbre Viaskin® ou un placebo. Par la suite, les enfants du groupe placebo se verront administrer le traitement actif, alors que les autres continueront la désensibilisation avec les timbres Viaskin®. Au terme de l’étude, tous les participants auront reçu une immunothérapie épicutanée de trois ans.

Pendant une bonne partie de son éducation primaire, Laurent devra se promener avec un timbre circulaire de quelques centimètres de diamètre dans son dos. Ce timbre contient les allergènes de l’arachide. Ces mêmes allergènes qui pourraient entraîner une anaphylaxie si le garçon les consommait, même en petite quantité. Si le traitement fonctionne, Laurent pourra être exposé aux arachides sans réagir.

Pour atteindre un état de tolérance, la personne allergique doit être mise en contact régulier avec l’allergène qu’elle doit éviter. Et accepter ce contact signifie vivre avec la crainte d’une réaction allergique, d’une anaphylaxie. En effet, la désensibilisation n’est pas sans risque. Mais contrairement aux traitements de désensibilisation orale, l’immunothérapie épicutanée n’a pas induit, jusqu’à présent, de réaction systémique lors des études cliniques, ce qui représente un avantage considérable pour les patients.

Faire des concessions

Malgré l’opportunité qu’offre l’étude clinique, Laurent et sa famille devront faire des compromis pendant quelques années. Des journées de travail et d’école écourtées pour se rendre à l’hôpital, des prises de sang, des démangeaisons et des rougeurs aux sites d’application du timbre, et une montagne russe d’émotions pour tous les membres de la famille.

Le processus de désensibilisation est également parsemé de remises en question. « La première fois qu’on lui a mis la patch, Laurent a paniqué, se rappelle Marie-Ève. Comme mère, je me suis demandé si je lui faisais vivre cette anxiété-là pour rien. »

De l’espoir dans l’air

Pour la mère de famille, la désensibilisation représente un avenir moins risqué pour son fils. « Notre espoir n’est pas nécessairement que Laurent perde son allergie, précise Marie-Ève. Notre espoir, c’est de lui enlever une épée de Damoclès au-dessus de la tête, de diminuer son risque de choc, son risque de mourir. » Marie-Ève est consciente que même s’il perd son allergie aux arachides, Laurent devra tout de même continuer d’éviter certaines noix. L’étude clinique est donc la première étape d’un chemin incertain.

Pour le moment, la désensibilisation ne se pratique au Québec que dans le cadre d’études cliniques. Bien que les résultats soient prometteurs, l’immunothérapie n’est toujours pas une panacée. Malgré tout, on ose croire que l’allergène pourrait changer la donne.

[1] DBV technologies. (2017) Des nouvelles données présentées au Congrès 2017 de l’AAAAI confirment le bon profil d’efficacité et de sécurité d’emploi à long terme de Viaskin Peanut, chez les enfants allergiques à l’arachide après trois ans de traitement [PDF]. Repéré à https://media.dbv-technologies.com/d286/ressources/_pdf/5/3922-DBV_AAAAI_Data_Release_FR.pdf
et
[2] ByeByeAllergies. L’immunothérapie orale.
[3] Jones, S. M. et coll. (2016). Epicutaneous immunotherapy for the treatment of peanut allergy in children and young adults. Journal of Allergy and Clinical Immunology, 139(4):1242-1252. Repéré à DOI 10.1016/j.jaci.2016.08.