5 faits intéressants sur l’immunothérapie par voie cutanée

Par Katia Vermette, rédactrice

On parle de plus en plus de l’immunothérapie comme d’un éventuel traitement des allergies alimentaires. Vous connaissez certainement l’immunothérapie par voie orale, qui consiste à administrer par la bouche des doses croissantes d’un allergène, jusqu’à l’atteinte d’une certaine tolérance. Bien que potentiellement efficace, ce type d’immunothérapie est également associé à un risque relativement élevé de réactions allergiques sévères, incluant l’anaphylaxie. Mais voilà qu’une pharmaceutique européenne a mis au point une forme d’immunothérapie par voie épicutanée qui semble assez prometteuse! Afin de piquer votre curiosité, voici 5 faits intéressants sur le sujet.

1. L’immunothérapie par voie épicutanée utilise la peau comme vecteur pour induire la tolérance à un allergène

En fait, l’immunothérapie par voie épicutanée qui fait les manchettes ces derniers temps utilise un timbre (Viaskin®) que l’on applique directement sur la peau afin d’y présenter l’antigène. Le timbre contient une chambre de condensation qui, lorsqu’elle entre en contact avec la peau, permet la libération de l’allergène et son absorption au niveau de l’épiderme [1]. C’est là que les cellules de Langerhans, des cellules dendritiques, pourront capter l’allergène et l’apporter jusqu’aux ganglions lymphatiques, où un état de tolérance à l’allergène sera éventuellement induit [2]. On observera avec le temps une baisse de la réponse Th2, associée à la production d’IgE, sans pour autant modifier la réponse Th1 [2]. Rappelons-nous que le développement d’une allergie médiée par les IgE est associée à une réponse Th2 importante par rapport à la réponse Th1.

2. L’immunothérapie par voie épicutanée est sécuritaire

Les études effectuées jusqu’à présent sur l’immunothérapie par voie épicutanée montrent des résultats d’innocuité intéressants. Une étude voulant évaluer la sécurité des timbres Viaskin® a rapporté des effets indésirables chez environ 90 % des sujets. Toutefois, ces effets indésirables étaient majoritairement locaux (érythème, eczéma, œdème) et apparaissaient pour la plupart au site d’application du timbre [3]. L’immunothérapie par voie épicutanée n’a pas induit, au cours des études cliniques qui ont eu lieu jusqu’à présent, de réactions systémiques comme l’anaphylaxie, bien qu’il soit impossible pour le moment d’exclure cette possibilité [2]. Le profil sécuritaire de ce type d’immunothérapie pourrait être expliqué par le fait que les allergènes provenant du timbre n’atteignent pas la circulation sanguine, contrairement à l’immunothérapie par voie orale ou sublinguale [2].

3. L’immunothérapie par voie épicutanée est efficace

L’application répétée dans le temps des timbres contenant l’allergène dans le cadre de l’immunothérapie par voie épicutanée entraînent la production de cellules T régulatrices (Tregs) qui sont associées à l’apparition d’un état de tolérance [3]. Ainsi, les résultats préliminaires de l’étude ARACHILD, parus en 2014, montrent une réponse positive à l’immunothérapie par voie épicutanée chez 40 % des sujets [4]. Plus intéressant encore, l’efficacité de l’immunothérapie chez les enfants de 5 à 11 ans atteignait 67 % [4]. L’effet du traitement semble également perdurer dans le temps, et ce même après l’arrêt du traitement [2, 3].

4. Afin d’induire un état de tolérance, l’immunothérapie par voie épicutanée doit être appliquée sur une peau intacte

Un fait intéressant sur l’immunothérapie par voie épicutanée est qu’elle peut induire un état de tolérance seulement lorsqu’on l’applique sur une peau intacte [3]. Des études chez la souris ont en effet montré que si l’on appliquait le timbre sur une peau intacte, on observait une diminution de la concentration d’IgE. Au contraire, cette dernière augmentait si le timbre était appliqué sur une peau abîmée, haussant par le fait même le risque qu’une réaction allergique se produise [1].

5. L’immunothérapie par voie épicutanée est toujours en investigation

Plusieurs études sur l’immunothérapie par voie épicutanée sont actuellement en cours afin de déterminer avec plus de certitude et dans une population plus large son profil d’innocuité et son efficacité. Les arachides, le lait et les œufs figurent parmi les allergènes ciblés par ce type d’immunothérapie [2]. Et, bien que l’immunothérapie ne soit pas offerte en clinique à l’heure actuelle, ses applications potentielles sont nombreuses. Les fabricants du timbre Viaskin® sont optimistes et prévoient tester l’utilisation de l’immunothérapie par voie épicutanée dans le traitement de plusieurs pathologies, notamment la polyallergie, la maladie cœliaque et le diabète de type 1 [2].

En attendant, tous les espoirs sont permis!

[1] Mondoulet L. et coll. Intact skin and not stripped skin is crucial for the safety and efficacy of peanut epicutaneous immunotherapy (EPIT) in mice. Clin and Translational Allergy, 2012, 2:22.
[2] Site Internet de la pharmaceutique DBV Technologies. https://dbv-technologies.com/fr/?s=epit (consulté le 8 juillet 2015).
[3] Jones S. M. et coll. State of the art on food allergen immunotherapy: oral, sublingual, and epicutaneous. J. Allergy Clin Immunol, 2013, 133(2):318-323.
[4] Dupont C. et coll. Peanut epicutaneous immunotherapy (EPIT) in peanut allergic chilodren: 18 months treatment in the ARACHILS study [abstract]. J Allergy Clin Immunol, 2014, 133(suppl):AB102.